L'une des voies reliant Banneu, Daleu et plusieurs sous-préfectures.jpg
À Man, capitale du District des Montagnes, les routes en ruine et les promesses non tenues du RHDP ravivent la colère des populations. Entre frustration populaire et manquement aux obligations de l’État, le Tonkpi dénonce une inégalité territoriale devenue structurelle.
Abidjan, 20 octobre 2025 (crocinfos)---Dans une récente publication relayée par Saint-Claver Oula, acteur reconnu de la société civile, les images de routes délabrées à Man, capitale du District des Montagnes, ont ravivé le débat sur l’injustice infrastructurelle dont souffre la région du Tonkpi. Cette vidéo, largement diffusée sur les réseaux sociaux, met en évidence l’état de dégradation avancée des principales artères urbaines, notamment l’axe Camp Séa – Collège moderne, autrefois symbole du dynamisme de la ville. Dans les années 1990, cette voie, reliant le camp de gendarmerie jusqu’à Gbêpleu, en passant par le Lycée Jean de la Menais et le Lycée Domoraud, était l’une des vitrines de Man. Aujourd’hui, elle n’est plus qu’un vestige du passé.
Ce constat est d’autant plus préoccupant que la ville est administrée par des cadres influents du Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP) : le maire, le président du Conseil régional, Dr Mabri Toikeusse, et le gouverneur du district, Dr Albert Flindé, tous issus du parti au pouvoir. Lors des campagnes locales, leurs discours promettaient un développement « fulgurant » en échange du soutien des populations. Or, trente-deux ans plus tard, les infrastructures routières de Man régressent, et les habitants s’en indignent : « Pardonnez, donnez un peu de goudron à Man, là-bas les populations mangent goudron », ironisent certains.
Le cri d’alarme de Saint-Claver Oula rejoint celui d’Augustin Sekaleu, originaire de Danané, qui dénonce également l’état désastreux des voies reliant Banneu, Daleu et plusieurs sous-préfectures. Pour lui, « si en quinze années de gestion, le Tonkpi n’a rien reçu, cinq ans ne suffiront pas à réparer tant d’injustices ». Cette affirmation révèle un profond malaise : celui de la rupture d’égalité territoriale, en contradiction avec l’article 4 de la Constitution ivoirienne de 2016, qui garantit à chaque région un accès équitable aux services publics et aux investissements.
Au regard du droit administratif, la responsabilité de l’État peut être engagée pour carence fautive, notamment lorsque le défaut d’entretien des routes compromet la sécurité et l’activité économique. Le principe de continuité du service public impose en effet à l’administration de maintenir les infrastructures indispensables à la cohésion nationale. L’absence de concrétisation des promesses de développement constitue par ailleurs une faute de gouvernance, contraire aux principes de transparence et de bonne administration.
Ainsi, les préoccupations exprimées par Saint-Claver Oula et Augustin Sekaleu traduisent la lassitude d’une population marginalisée. Si la capitale du District des Montagnes s’enlise dans la poussière et les nids-de-poule, que dire des zones rurales ? Le Tonkpi devient le symbole d’une inégalité territoriale structurelle, appelant une action urgente fondée sur le respect du droit au développement et de l’équité régionale, piliers indispensables d’une Côte d’Ivoire juste et inclusive.
Sériba Koné