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[Législatives 2025 en côte d'ivoire] Pourquoi Tidjane Thiam doit regretter

[Législatives 2025 en côte d'ivoire] Pourquoi Tidjane Thiam doit regretter

Le président du PPA-CI Laurent Gbagbo reçoit son homologue du PDCI-RDA, Tidjane Thiam (Mama, le 24 février 2024). Archives

Tidjane Thiam, figure montante de la politique ivoirienne, perd doublement dans le contexte des législatives 2025 : son absence à l’Assemblée nationale et son choix de confrontation plutôt que de dialogue compromettent ses ambitions.

Abidjan (Côte d’Ivoire), le 1er novembre 2025 (crocinfos)---Tidjane Thiam, une figure montante de la politique ivoirienne, se trouve à un carrefour décisif dans sa carrière. Non seulement il perd sur deux fronts cruciaux, mais il semble aussi se retrouver face à des choix politiques qui pourraient marquer son avenir. D’un côté, son absence à l’Assemblée nationale, de l’autre, sa stratégie de confrontation plutôt que de dialogue à l’approche de la présidentielle d’octobre 2025, font de ces législatives de 2025 un moment clé pour l’opposition.

Dans l’histoire politique de la Côte d'Ivoire, les tensions électorales ont souvent été exacerbées par des conflits violents. Toutefois, au-delà de cette violence, il existe une tradition d’unité et de dialogue portée par des figures emblématiques comme Félix Houphouët-Boigny et Aimé Henri Konan Bédié. Ces anciens présidents ont compris que la politique véritable réside dans la collaboration et l'unité face aux crises internes et externes. Un enseignement que Thiam semble avoir négligé.


Une leçon de légitimité démocratique

Félix Houphouët-Boigny et Aimé Henri Konan Bédié ont tous deux d’abord été élus députés avant de gravir les échelons jusqu’à la présidence. Cette expérience législative leur a conféré une légitimité démocratique précieuse et une compréhension approfondie du fonctionnement des institutions. En Côte d'Ivoire, être député ne se limite pas à un rôle local ; il s'agit de participer activement à l'élaboration des lois, à la surveillance de l'action gouvernementale et à la représentation des citoyens. Laurent Gbagbo, par exemple, a incarné ce modèle avant de devenir président.

Alors que ses prédécesseurs ont choisi la diplomatie, Thiam semble avoir opté pour l’agitation. Cette posture pourrait avoir des conséquences politiques graves.

Mais Thiam, encore jeune dans son parcours politique, peine à franchir cette étape essentielle. Il n’a pas réussi à s'imposer comme élu de la nation et doit encore attendre, potentiellement cinq années supplémentaires, pour pouvoir se présenter aux législatives. Ce retard dans son parcours politique, couplé à une approche privilégiant la confrontation, pourrait bien se retourner contre lui. Alors que ses prédécesseurs ont choisi la diplomatie, Thiam semble avoir opté pour l’agitation. Cette posture pourrait avoir des conséquences politiques graves.

Si la marche peut constituer une forme légitime d'expression, elle ne doit pas se substituer à l’action politique constructive. Pourquoi ne pas avoir exploré d’autres alternatives ? Pourquoi, face à la candidature de Thiam et Gbagbo, l’opposition n’a-t-elle pas cherché à proposer un autre candidat ou à structurer un projet démocratique plus unificateur pour rassembler les électeurs autour d’une alternative crédible ? L’enjeu des élections législatives est d’une importance capitale : il s’agit de donner une voix à l’opposition à l’Assemblée nationale.

Les élections législatives prévues pour décembre 2025 soulignent le rôle important des députés dans l’organisation politique du pays. Un député n’est pas seulement un élu local, mais un législateur chargé de proposer, amender et voter des lois. Dans une démocratie saine, le rôle de contrôle de l’action gouvernementale est tout aussi fondamental : les députés sont responsables de la surveillance des ministres, de la création de commissions d’enquête et de la possibilité de soumettre des motions de censure.


Un message de paix et de stabilité à envoyer

Dans un contexte de violence politique grandissante, la mobilisation des électeurs pour les élections législatives devient un enjeu majeur. Les candidats doivent envoyer un message clair de paix et de stabilité, conscients que chaque action peut avoir un impact direct sur la violence dans certaines régions. Lors de sa rencontre avec le président de la Commission Electorale Indépendante (CEI), Coulibaly Kuibert, il a été souligné que les candidats doivent éviter de faire l’apologie de la violence, au risque de perdre toute légitimité auprès de leurs électeurs.

Le principal défi pour l’opposition ivoirienne sera de surmonter ses divisions internes et de se présenter comme une alternative crédible. Après la défaite cuisante lors de la présidentielle d’octobre 2025, où la candidature d’Alassane Ouattara a dominé sans réelle opposition, l’opposition devra se ressaisir pour obtenir au moins 130 sièges sur les 225 de l’Assemblée nationale. La question est donc de savoir si l’opposition parviendra à mobiliser suffisamment d’électeurs et à se structurer autour d’une vision commune pour l’avenir du pays.

Dans une démocratie saine, le rôle de contrôle de l’action gouvernementale est tout aussi fondamental : les députés sont responsables de la surveillance des ministres, de la création de commissions d’enquête et de la possibilité de soumettre des motions de censure.

Les appels à la manifestation du 8 novembre 2025 sont à l’heure actuelle une étape importante, mais il serait important qu’ils se traduisent par des actions politiques plus concrètes et stratégiques. La marche pourrait bien se limiter à une simple manifestation symbolique, mais si elle est suivie d’une stratégie électorale bien pensée, elle pourrait se transformer en un véritable levier politique.


Les regrets de Tidjane Thiam

Dans ce contexte politique complexe, Tidjane Thiam perd sur deux fronts : d'une part, son absence à l’Assemblée nationale, un passage obligé pour toute carrière politique solide, et d’autre part, son choix de privilégier la confrontation au dialogue. Alors que la Côte d'Ivoire se trouve à un tournant décisif de son histoire (la jeunesse monte en puissance), l’avenir politique du pays dépendra largement de la capacité de ses leaders à transcender les clivages et à œuvrer ensemble pour une stabilité durable. Thiam, en négligeant le chemin de l’unité, risque de perdre non seulement ses chances de représenter la nation, mais aussi son influence dans l’avenir politique de la Côte d'Ivoire.


Charles Kpan