RSF alerte sur les menaces contre les journalistes avant la présidentielle 2025
RSF dénonce des menaces et intimidations visant des journalistes ivoiriens à quelques mois de la présidentielle, rappelant que la Côte d’Ivoire occupe la 64ᵉ place mondiale pour la liberté de la presse.
Abidjan, 22 juillet 2025 (crocinfos.net)---Reporters sans frontières (RSF) se dit vivement préoccupée par la recrudescence des menaces et intimidations visant les journalistes en Côte d’Ivoire, à quelques mois de l’élection présidentielle prévue pour le 25 octobre prochain. Selon l’organisation, depuis début mai, au moins deux journalistes ont été la cible d’attaques directes, révélant un climat d’insécurité préoccupant pour la presse ivoirienne.
Le cas de M’ma Camara, journaliste et coordinatrice régionale de France 24, illustre ces atteintes. Le 14 juin dernier, lors de la couverture d’un meeting du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), elle a pris soin de ne porter ni casquette ni bonnet au logo de son média pour demeurer discrète. Bien que la couverture se soit déroulée sans incident majeur, la journaliste demeurait sous pression après avoir fait l’objet, deux semaines auparavant, d’une campagne de dénigrement consécutive à la couverture d’un précédent meeting. Un cadre du PDCI, Rodrigue Koffi, avait publié une lettre ouverte sur les réseaux sociaux contenant des attaques personnelles et des accusations de partialité, entraînant la publication de son adresse personnelle et de celle de sa famille. « Je n’ai pas pu apparaître à l’écran pendant plusieurs jours », confie-t-elle. À ce jour, Rodrigue Koffi n’a pas répondu aux sollicitations de RSF, et le président du parti, Tidjane Thiam, n’a pas publiquement condamné ces agissements.
Les intimidations proviennent également de l’appareil étatique. Les appels de responsables politiques ou administratifs visant à intimider des journalistes après la publication d’articles sont fréquents, particulièrement en période électorale. « Un membre du gouvernement est connu pour ces pratiques », indique sous couvert d’anonymat un professionnel du secteur, ajoutant que ces échanges se muent parfois en menaces directes.
Dans ce contexte déjà tendu, RSF révèle l’arrestation, le 10 juillet dernier, du journaliste béninois Hugues Comlan Sossoukpé. Réfugié politique au Togo, il avait été invité en Côte d’Ivoire par le ministère de la Transition numérique et de la digitalisation pour couvrir un salon sur l’innovation numérique. Il a ensuite été remis aux autorités béninoises, qui l’ont incarcéré.
Face à ces atteintes répétées à la liberté de la presse, RSF appelle d’urgence les autorités ivoiriennes et les acteurs politiques à garantir la sécurité des journalistes avant, pendant et après la présidentielle. « Aucun développement démocratique n’est possible sans une presse libre et protégée », souligne Sadibou Marong, directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF.
En 2025, la Côte d’Ivoire occupe la 64ᵉ place sur 180 pays et territoires dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF, un rang qui reste préoccupant pour un pays engagé dans un processus électoral déterminant.
Recommandations de RSF
RSF exhorte les autorités à :
Assurer la protection des journalistes contre toute forme de pression, discrimination ou violence, sur le terrain comme en ligne ;
Condamner publiquement toute menace, campagne de dénigrement ou agression visant des journalistes ;
Instruire clairement les préfets et forces de sécurité à ne tolérer aucune atteinte aux professionnels de l’information ;
Garantir un accès libre et sécurisé à Internet et aux réseaux sociaux pendant la période électorale.
Elle recommande également aux partis politiques de :
Faciliter l’accès des journalistes à leurs événements ;
Protéger les professionnels des médias contre toute entrave à leur travail lors de rassemblements ;
Sanctionner les militants et membres responsables de menaces ou d’actes hostiles envers la presse.
Charles Kpan