Le directeur régional des Eaux et Forêts du Tonkpi, le colonel Évariste Djan Yapo
Face à une pollution galopante des cours d’eau à Man, le colonel Évariste Djan Yapo, directeur régional des Eaux et Forêts du Tonkpi, alerte sur les risques environnementaux imminents et appelle à une mobilisation collective.
Man, le 1er juin 2025 (crocinfos.net)---Le directeur régional des Eaux et Forêts du Tonkpi, le colonel Évariste Djan Yapo, se dit profondément préoccupé par l’état alarmant des cours d’eau traversant la ville de Man. Le samedi 31 mai, face à la presse, il a tiré un signal d’alerte quant à une pollution imminente menaçant la biodiversité aquatique et la qualité de l’eau dans cette région de l’ouest ivoirien.
Selon lui, les déversements massifs et quotidiens d’ordures ménagères et de déchets non biodégradables dans les rivières, notamment la Dounh, la Kôh et celle traversant le quartier Capen, constituent une bombe écologique à retardement. Des pollutions répétées seraient à l’origine de la disparition progressive de certaines espèces de poissons.
« Si rien n’est fait, ce sera la catastrophe. Certains systèmes d’assainissement, y compris ceux de la prison civile de Man, sont directement raccordés aux rivières. On y trouve même des déchets industriels, des copeaux de bois, et parfois des minerais oxydables dangereux pour la vie aquatique. La situation est critique », a-t-il déploré.
Le colonel Djan Yapo a insisté sur l’urgence d’une action concertée impliquant autorités administratives, chefferies traditionnelles, leaders communautaires et populations locales : « Tous doivent prendre le taureau par les cornes pour éviter une catastrophe écologique aux conséquences incalculables, y compris sur la nappe phréatique », a-t-il martelé.
Malgré une première initiative prometteuse, avec une campagne de sensibilisation au code de l’eau et un projet de reboisement entamé le 15 novembre 2024 à l’occasion de la Fête de la Paix, aucune action significative n’a suivi. Une réunion d’information s’était pourtant tenue à la salle de conférence de la Cgrae, en présence des autorités coutumières et administratives, mais les promesses d’engagement semblent rester lettre morte.
La réglementation prévoit pourtant une zone de protection de 25 mètres autour des rivières, espace aujourd’hui envahi par des cultures maraîchères utilisant engrais chimiques et pesticides, et par des dépôts sauvages de déchets. Cette occupation illégale des berges aggrave la pollution des eaux.
Dans un dernier appel, le directeur régional a exhorté la municipalité à traduire ses engagements en actes : « Nous avons reçu des assurances quant à leur implication dans l’aménagement des berges, mais il est temps de passer aux actions concrètes. »
Pour rappel, le nouveau code de l’eau en Côte d’Ivoire prévoit des sanctions sévères à l’encontre des pollueurs. Le préfet de région, Soro Fatogoma, a d’ailleurs rappelé l’importance du respect strict des dispositions légales en matière de gestion de l’eau. Toutefois, l’heure n’est pas encore à la répression : « Nous misons d’abord sur la responsabilisation des populations pour une prise de conscience éco-citoyenne. »
La sauvegarde de l’environnement à Man dépend désormais d’une mobilisation collective urgente et déterminée. Les rivières ne sont pas seulement des ressources naturelles, elles sont la mémoire vivante d’un territoire, qu’il convient de protéger avec rigueur et responsabilité.
Sosthène Guéi, correspondant indépendant