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[Côte d’Ivoire – Présidentielle 2025] Yaya Fofana, l’ambition d’un réformateur au cœur du RHDP (analyse)

[Côte d’Ivoire – Présidentielle 2025] Yaya Fofana, l’ambition d’un réformateur au cœur du RHDP (analyse)

Yaya Fofana, président du MFA

Les Unes croisées du Nouveau Réveil et du Sursaut, datées du 17 juin 2025, viennent jeter une lumière crue et révélatrice sur une figure politique encore sous-estimée mais qui, à la faveur d’un contexte de succession trouble au RHDP, semble vouloir se tailler une place au soleil : Yaya Fofana.

Abidjan, le 17 juin 2025 (crocinfos.net)---Président du Mouvement des Forces d’Avenir (MFA), parti allié au Rassemblement des Houphouëtistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), Yaya Fofana n’est pas un inconnu du paysage politique ivoirien. Mais jusqu’ici, son nom apparaissait en marge des dynamiques centrales du pouvoir. Les récentes publications médiatiques viennent rebattre les cartes.

D’un côté, Le Nouveau Réveil l’affiche comme un homme en colère, dénonçant ouvertement le fonctionnement du RHDP. En bas de Une, une formule lapidaire : "Yaya Fofana dénonce le fonctionnement du RHDP". De l’autre, Le Sursaut nuance cette posture apparemment critique par une déclaration plus stratégique : « Ma candidature à la présidence du RHDP n’est pas un acte de défiance, mais… ». Suit un slogan politique : "Pour un RHDP rénové, une alternance apaisée, et une Côte d’Ivoire réconciliée". Ces deux angles, loin d’être contradictoires, révèlent plutôt une ligne politique fine, calibrée : celle d’un réformateur en quête d’ancrage.

Là où certains ont cru à une posture d’opposant, voire de frondeur, Le Sursaut précise la nature de la candidature de Fofana. Il ne s’agit pas d’une campagne hors du RHDP, mais bien d’une postulation à la présidence de la coalition elle-même. Une ambition claire : succéder à Alassane Ouattara, non pas en opposition frontale, mais par la voie interne, celle de l’investiture du parti majoritaire.

Ce choix tactique change radicalement la donne : Fofana ne veut pas renverser la table, il veut s’asseoir à celle des héritiers légitimes. Il se positionne au même niveau que les autres éléphants pressentis : Tiémoko Meyliet Koné, Patrick Achi, Adama Bictogo ou encore Kandia Camara.

Un langage de continuité rénovatrice

"Ce n’est pas un acte de défiance." La phrase n’est pas anodine. Elle constitue un message codé aux cercles du pouvoir. Dans une configuration post-Ouattara encore incertaine, marquée par des rivalités sourdes et des ambitions feutrées, Yaya Fofana veut rassurer. Il se rêve en homme de synthèse, capable d’offrir à la fois la stabilité et la modernisation tant réclamée au sein du RHDP.

En définitive, Yaya Fofana joue une carte audacieuse mais lucide. Il ne brûle pas les ponts, il tente de les traverser. Il ne sabote pas la coalition, il cherche à l'incarner autrement.

À travers son slogan, il inscrit son projet dans un triptyque consensuel : rénovation, alternance apaisée, réconciliation nationale. Une musique douce à l’oreille d’un électorat lassé des tensions et des fractures.

Mais cette posture de réformateur au sein même du système révèle une autre réalité : les lignes bougent dans la maison RHDP. Le simple fait que le président du MFA ose publiquement annoncer sa candidature à la tête du RHDP atteste d’un espace d’incertitude, sinon de vide, quant à la succession de M. Ouattara.

Cette initiative met également en lumière les limites du consensus annoncé autour d’un dauphin désigné. Fofana s'engouffre dans cette brèche, espérant rallier à lui une partie de la base militante et des cadres frustrés par une succession imposée d’en haut.

En définitive, Yaya Fofana joue une carte audacieuse mais lucide. Il ne brûle pas les ponts, il tente de les traverser. Il ne sabote pas la coalition, il cherche à l'incarner autrement. Sa stratégie repose sur un subtil équilibre : être assez critique pour capter les voix du changement, mais assez loyal pour rassurer l’appareil RHDP.

Il reste à voir si cette posture intermédiaire lui permettra de peser réellement dans le jeu, ou s’il sera broyé par la mécanique impitoyable d’un parti où les rapports de force s’établissent moins dans les médias qu’au sein de cercles restreints et opaques.

Une chose est sûre : le simple fait que son nom apparaisse aujourd’hui sur deux Unes nationales est déjà un acte politique fort. Et dans une élection où tout reste à écrire, Yaya Fofana pourrait bien être l’un des scénaristes surprises du feuilleton 2025.


Charles Kpan